Webdoc : Le mystère du « mystère de Grimouville »

Posted on 8 mars 2013 par

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Depuis quelques semaines, certains noms incontourables du webdocumentaire semblent s’être accordés sur les réseaux sociaux pour faire l’éloge d’un nouveau projet en cours de production. Intrigué par cet engouement quasi unanime autour du « Mystère de Grimouville« , webdocumentaire en cours de collecte de crowfunding sur KissKissBankBank, Le Blog Documentaire a tenté de percer le mystère qui se cache derrière cette unanimité soudaine…

grimouvilleA l’énigme que tentent de percer les deux jeunes porteurs du projet, n’en existe-t-il pas une autre, au cœur même du projet en question ? Comment Charles-Henri Groult et Romain Jeanticou, les deux réalisateurs, ont-ils réussi à fédérer autour d’eux des soutiens aussi notables ? Ce mystère (dans le mystère) de Grimouville est aussi épais que l’est le brouillard dans lequel baigne ce petit village normand de 150 habitants où sévit depuis quatre ans un « serial-colleur » inconnu. Car si le propos du webdocumentaire, qui propose à l’internaute de démasquer l’identité de cet improbable colleur d’affiches et de ses revendications à travers un parcours dans le hameau normand, est ce qu’on appelle communément « un bon sujet », est-ce vraiment suffisant pour qu’une telle unanimité apparaisse autour de lui ?

Rappelons le contexte : toutes les semaines, dans la nuit du vendredi au samedi, un individu masqué vient coller une affiche sur le mur du cimetière. Sur cette affiche figure un numéro qui augmente chaque semaine d’une unité. Revendication politique, performance artistique ou signe d’un deuil ? Les questions restent en suspens. L’affiche fait dorénavant partie du décor, le « serial colleur » n’a apparemment pas l’intention de s’arrêter  et les villageois se sont habitués à cet étrange rituel hebdomadaire.

Cette énigme, digne de Cluedo ou de Rouletabille, a donc attiré l’appétit journalistique de Charles-Henri Groult et Romain Jeanticou. Si les deux jeunes enquêteurs ne me dévoileront ni l’identité, ni les intentions de cet anonyme – en ont-ils seulement connaissance ? –, ils me racontent la genèse de ce projet : « Le sujet a d’abord fait l’objet d’un article papier rédigé dans le cadre d’un examen au CFJ. Puis, on s’est dit qu’on voulait aller plus loin. On voulait vraiment découvrir qui était cette personne, pourquoi elle collait ces affiches et ce que ce chiffre représentait. On s’est dit que ce serait aussi un prétexte pour découvrir ce petit village normand et aller à la rencontre de ses habitants. L’idée du webdocumentaire s’est imposée assez rapidement. Nous voulons immerger l’internaute dans ce petit village normand pour qu’il aille à la rencontre de ses habitants, au-delà de l’histoire du colleur d’affiche. Il ne s’agit pas de faire du « strip-tease » mais l’idée est un peu similaire ». C’est ainsi que le Mystère de Grimouville, encore en cours de réalisation, est né et a retenu l’attention du jury du premier prix « Webdoc Figra ».

Mais revenons au mystère qui nous intéresse, celui de l’unanimité de jugement que remporte ce projet. La sélection au prix « Webdoc Figra », qui récompense des porteurs de projets multimédia (mêlant le reportage et le documentaire), pourrait-elle à expliquer ce phénomène (assez rare, faut-il en convenir) ? Raté, ce n’est pas la bonne piste :

« Le mini-buzz a démarré car Alexandre Brachet, qui était venu donner un cours au CFJ, a trouvé notre idée intéressante et marrante. Il a parlé de notre projet sur Twitter. Apparemment cela n’arrive pas si souvent. C’est pour cela que Doc Side Stories, Wilfrid Estève, Erwan Gaucher… et même David Dufresne nous ont également soutenu. C’est un effet boule de neige, tout simplement. Pour être honnête, on ne savait pas qui étaient tous ces gens. Quand on nous a dit qu’ils étaient très influents et surtout très reconnus dans ce milieu, on était un peu étonnés. On ne sait pas vraiment nous-mêmes pourquoi il y a eu un tel engouement !« 

Est-ce la chance du débutant ? Nos deux jeunes auteurs en profiteront-ils pour chercher des soutiens financiers, techniques ou artistiques ? Certainement. Mais pour l’heure, d’autres questions les taraudent. Doivent-ils dévoiler l’identité de cette personne ou seulement ses ambitions ? À quel moment faudra-t-il sortir le webdocumentaire ? Autant de questions qui transforment curieusement l’intervieweuse en interviewée…

Il reste donc du travail à nos deux jeunes journalistes, notamment réussir leur collecte de fonds pour pouvoir lever le voile sur le Mystère de Grimouville et prouver que cet effet boule de neige… ne fondera pas au premier rayon de soleil.

Sibel Ceylan2013-03-05_165025